29 mars 2024

La liberté d’expression en danger…

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La  liberté  d’expression  est  un  droit  fondamental  qui  devrait être  protégé en  toutes  circonstances. 

En droit français, le point d’ancrage de la liberté d’expression se trouve dans la Déclaration  des Droits de l’Homme et du Citoyen qui stipule dans son article 10 que « Nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas  l’ordre  public  établi  par  la  loi ».  L’énoncé  montre bien l’importance  de la résistance individuelle face à l’Etat coercitif. L’article 11 de la Déclaration de 1789 va même encore plus loin en formulant  un  mode  d’emploi  concret de cette liberté, rappelant que « la libre  communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette  liberté  dans  les  cas  déterminés par la Loi ».  La  formulation  n’est  pas  seulement  belle  et  solennelle. Elle est  puissante car elle pose le  principe que la liberté d’expression est l’expression même de la liberté humaine. Malheureusement pour les Français, cette liberté a  été  constamment réduite  par  des  ajouts  législatifs  successifs jusqu’à  ce  qu’en  2020, sous  l’emprise de l’Etat d’Urgence Sanitaire qui instaure un régime politique d’exception, la liberté  d’expression soit fortement remise en cause.  

Du 29 juillet 1881 qui consacre la liberté de la presse jusqu’à aujourd’hui, jamais la liberté  d’expression  n’a  été  autant  menacée. En  1972,  la  loi Pleven,  souhaitant lutter contre le racisme et l’antisémitisme, marque une première étape dans le durcissement de la loi de 1881  au risque de développer une approche communautariste qui n’est pas vraiment dans la nature  du droit français. Désormais, toute incitation à la haine par des propos ou des écrits publics  devient une infraction pénale. Le délit de « provocation publique à la haine raciale » inscrit  dans l’article 1 de la loi de 1972 est passible de plus d’un an de prison et/ou de 45 000 euros  d’amende.  Le  Législateur, confronté  à  la  difficulté  juridique  de  définir  l’objet  de  la  discrimination sans l’objectiver, a opté pour des formules vagues comme « l’appartenance  vraie  ou  supposée… » qui  ouvrent la  porte  à  tous  les  abus et  à des  condamnations quasi systématiques. Tout au long du XXème siècle, sous la pression des lobbys, la lutte contre les  discriminations s’est durcie dans notre pays, transposant les hypothèses d’injures raciales ou  religieuses dans les domaines du sexisme, du handicap et de l’homophobie.  En 1990, le cadre  répressif se renforce avec la loi du député communiste Jean-Claude Gayssot, dans le cadre du  Droit mémoriel, qui vise à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe et permet là encore de systématiser les condamnations. L’article premier de cette loi énonce que « toute  discrimination  fondée sur l’appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation,  une  race  ou  une  religion  est  interdite ». Malgré  les  pétitions  et  les  recours  en  anti constitutionnalité,  cette  loi demeure  dans  l’appareil  législatif  français  bien  que  beaucoup  reconnaissent qu’elle légalise le délit d’opinion. En 2001, la Loi Taubira ajoute une nouvelle pierre à l’édifice pénal des délits d’expression en qualifiant l’esclavage et la traite négrière de  crimes contre l’humanité. Napoléon Bonaparte qui a rétabli l’esclavage en 1802 avant qu’il ne  soit supprimé en  1848 est définitivement mis au ban de l’Histoire de France et interdit de  commémoration.

En  2013,  la  censure  monte  d’un  cran  en  apportant  une  reconnaissance  institutionnelle aux actions collectives que les individus soient directement visés ou non par une  discrimination.  Considérant  que  les  victimes  sont  souvent  trop  fragiles  ou  vulnérables  pour  se défendre  face au maquis juridique de la législation, l’article 48-1 de la loi de 1881  prévoit dès lors que « toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la  date des faits, se proposant par ses statuts, de défendre la mémoire des esclaves et l’honneur de  leurs  descendants,  de  combattre  le  racisme  ou  d’assister  les  victimes  de  discrimination  fondée  sur  leur  origine nationale,  ethnique,  raciale  ou  religieuse,  peut  exercer  les  droits  reconnus de la partie civile ». En 2014, la loi étend ces mêmes prérogatives aux associations  loi 1901 visant à « combattre les discriminations fondées sur l’orientation ou identité sexuelle  ou d’assister les victimes de ces discriminations ». La censure atteint là un point culminant. Combien d’associations épient le moindre dérapage de langage sur les réseaux sociaux pour  se  constituer  partie  civile,  intenter  des  procès  à  des  personnalités  – élus,  éditorialistes,  humoristes – car elles sont certaines d’être entendues par les tribunaux ? La législation a ainsi  entraîné un effet d’aubaine à la fois médiatique et financier pour la plus grande satisfaction  des groupuscules  sectaires et  communautaristes  qui, au nom de l’islamophobie, de la xénophobie, de l’homophobie, de la transphobie… traquent  le  lanceur  d’alerte et  le font systématiquement condamner. Durant le quinquennat d’Emmanuel Macron,  jamais la  répression  pénale  des  délits  de  presse,  d’opinion  et d’expression  n’a été  aussi  forte. L’engorgement de la 17ème chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris spécialisée dans  les délits de presse est désormais connu.  

Enfin, depuis  mars  2020,  depuis  la  légalisation de  l’Etat d’Urgence  Sanitaire, s’est  institutionnalisée une véritable « dictature d’opinion » sous la pression des réseaux sociaux.  Malheur à celle ou celui qui ne se soumet pas à l’idéologie du « politiquement correct ». Sa  réputation réelle et numérique sera définitivement compromise. C’est ainsi, au nom de cette  doxa totalitaire, que  des  comptes  Twitter  sont  arbitrairement  fermés,  que  des  vidéos  sur  YouTube sont supprimées, que des publicités (confer Evian) sont retirées de l’affichage pour  ne pas froisser les impétrants …  Le basculement est radical. Avec l’avènement de la tyrannie  sanitaire, il s’agit pour les minorités (LGBT, indigénistes, racialistes…) de terroriser pour mieux façonner l’opinion publique en influençant la masse des citoyens passifs. Combien sont ceux  qui  ont  eu  l’audace  d’exprimer  une  pensée  singulière  ou  de  contester la  stratégie  du  gouvernement  et  qui  se  voient  condamnés à  des  peines  de  prison  avec  sursis  ou  à  des  amendes exorbitantes ? Les dérives en matière de délits d’expression sont de plus en plus  nombreuses  et  The  Economist  a  eu  raison  de souligner en  février  2021  que  la  France  est  désormais considérée comme « une démocratie défaillante ».                 

Il  ne  reste  désormais  plus rien  de  l’esprit  et  de  la  lettre  de la  loi  du  29  juillet 1881. Les  gouvernements successifs ont réussi à en éliminer le cadre protecteur. Il est donc urgent de  la  réécrire  ou mieux, de l’abroger définitivement en  raison  de  son  obsolescence et de son illibéralisme.  

 


Tribune d’Agnès CERIGHELLI, Présidente du mouvement Les Souverainistes

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